Guide du touriste en @Organisation du tourismeSi vous lisez ce guide, c'est ou bien parce que vous avez l'habitude d'organiser vous-même vos voyages, et que vous cherchez des informations et conseils pour le faire, ou bien parce que vous avez cherché en vain des voyages organisés et que vous vous êtes résigné à vous débrouiller par vous-même. En effet, si vous n'avez pas trouvé d'agences pour prendre en charge votre voyage, ce n'est pas faute de chance ou d'habileté, mais c'est normal. Cet étonnant pays ne permet pas ce qu'on nomme le tourisme de masse. D'ailleurs, je ne vous apprends certainement rien. Vous aurez entendu les opinions courantes autour de vous sur le sujet. La plupart du temps, on ne se prive pas de blâmer ce pays à ce propos comme à tout propos. Les touristes y sont malvenus, se plaint-on, et tout est fait pour les décourager, en compliquant déjà l'organisation du voyage avant même le départ. Vous devrez bien sûr entreprendre vous-même une demande de visa. Mais c'est la moindre des choses, et c'est une procédure nécessaire pour bien d'autres pays. Seulement, quand vous voulez visiter d'autres pays, vous pouvez vous adresser à des professionnels pour organiser votre voyage, et n'avoir à vous soucier de presque rien, alors que ce n'est pas le cas pour aller en @. Le mieux, pour éviter de se fâcher inutilement et pour avoir l'attitude d'ouverture convenable pour découvrir un pays nouveau, c'est de chercher à comprendre les raisons de cette situation. En fait, le touriste n'est pas malvenu en @, pas plus qu'il n'est bienvenu d'ailleurs. Tout dépend de vous et du rapport que vous établissez avec les gens du lieu. On peut constater que certains se sentent très à l'aise dans ce pays, tandis que d'autres s'y sentent mal à l'aise et y découvrent mille raisons de s'irriter, y compris l'impression que le touriste et le tourisme ne sont pas aimés dans ce pays. Ce n'est pas vrai, et ce n'est pas tout à fait faux non plus. Mais, entre nous, qui aime les touristes ? Ni moi, ni vous probablement. On ne les tolère qu'à cause de l'argent qu'ils viennent dépenser, et on feint pour cela de les apprécier, comme le commerçant avec ses clients. Et ceux qui ne vivent pas du tourisme s'en accommodent aussi en pensant que l'économie de leur pays, de leur province, de leur ville en profite et leur est peut-être avantageuse en fin de compte. C'est pourquoi on vous incite à vous montrer souriant, sous prétexte que vous êtes supposé y gagner, alors que vous seriez porté sinon à faire mauvaise mine à tous ces touristes qui encombrent vos rues, font du bruit, considèrent tout le monde, vous y compris, comme des objets de curiosité au mieux, comme des sortes de vagues serviteurs au pire, et croient que tout est à leur disposition et disposé pour eux. Pourquoi les @ sentiraient-ils autrement ? Mais au lieu de faire bonne mine à mauvais jeu, ils ont décidé de ne pas chercher à tirer des revenus importants du tourisme. Pourquoi vous souriraient-ils donc s'ils ne vous trouvent pas sympathique ? Mais pourquoi aussi se montreraient-ils désagréables si vous leur êtes sympathique ? Laissons les lapalissades. Ce que vous aimeriez savoir, c'est pourquoi les @ sont réticents au tourisme tel qu'il est courant et généralement populaire dans le reste du monde. Je sais, vous avez déjà entendu une réponse toute prête dans l'opinion environnante. Les @ sont aristocratiques, hautains, méprisants pour tous les autres, et donc inhospitaliers, au point même que votre argent ne peut acheter leur sourire, et moins encore leur bienveillance. Plus sérieusement, plutôt qu'une hostilité face aux autres peuples, c'est l'activité même du tourisme, et plus particulièrement du tourisme de masse qui leur déplaît. Je supposais au paragraphe précédent que vous partagiez ce sentiment lorsqu'au lieu d'être vous-même touriste, vous subissez le tourisme des autres, sans en tirer personnellement de profit. Le tourisme gâche la vie de ceux qui doivent le subir, et il n'y a de raison de l'endurer que si c'est nécessaire ou particulièrement utile. Or les @ jugent que ses inconvénients dépassent nettement tous les avantages qu'on pourrait en tirer, et qu'on peut fort bien s'en passer dans la plus large mesure. Pour que les touristes soient supportables, pensent-ils, et je les comprends, il faut qu'ils soient peu nombreux et qu'on ne les rencontre pas en groupes plus ou moins importants. Il est préférable aussi que les touristes ne considèrent rien dans le pays comme étant destiné au tourisme, mais qu'ils sachent que tout ce qu'ils voient a une autre fonction bien plus essentielle. Aussi le touriste n'est-il jamais que toléré, à condition de rester discret et de ne pas déranger l'ordre du pays qu'il visite. Vous remarquerez vite sur place que presque rien n'est fait en fonction du touriste, et qu'au contraire on prend soin que le touriste ne gêne pas les activités des gens du lieu. Même les musées, par exemple, sont destinés à ceux qui s'intéressent sérieusement à l'art, de sorte qu'on évite de laisser des badauds incultes empêcher la contemplation des œuvres, et que, bien sûr, les visites guidées, si courantes chez nous, si agaçantes pour l'amateur d'art, y sont totalement interdites. Et qui sait ? Peut-être appartenez-vous à ceux qui se réjouiront du calme de ces lieux et de beaucoup d'autres qui sont troublés ailleurs par le tumulte de l'industrie touristique. Je ne vous explique pas comment, par des dispositions ingénieuses, on a réussi à régler le tourisme de manière à ce que le tourisme de masse soit exclu et que les agences de voyage ne puissent fonctionner en @. Pratiquement, il faut en tirer la conséquence que ceux qui veulent visiter ce pays sont obligés de faire les démarches par eux-mêmes et d'organiser personnellement leur voyage. Vous imaginez bien que, s'il n'est pas du tout impossible de résoudre les problèmes qui en résultent, il y faut une certaine motivation, du temps et de l'énergie. Ce dont les @ se réjouissent, parce qu'il en résulte qu'on ne rencontre en effet dans leur pays que des touristes assez motivés et peu nombreux. Vous vous étonnerez peut-être que je vous importune avec des explications sur les manières de penser des @, plutôt que de m'en tenir le plus possible à une série de conseils pratiques, que vous puissiez repérer aussitôt, sans vous attarder aux raisons des bizarreries dont il est déjà assez pénible de devoir tenir compte pour organiser votre voyage. Mais précisément, il importe beaucoup, lorsque vous voulez visiter @, d'être conscient que vous ne vous trouvez plus dans l'ordre touristique international, et qu'avant de partir déjà, il faut commencer à vous intéresser aux mœurs et conceptions de cet étrange pays. Ce n'est pas une raison d'oublier les conseils pratiques, que ce guide vous donne partout où ils peuvent être utiles, et qui le sont d'autant plus que, justement, vous ne pouvez vous fier aux spécialistes du tourisme international pour vous aider. |