L'Examinateur

Hebdomadaire de critique politique




Les impôts en @

Entretien avec le professeur François Duru

Monsieur le professeur Duru, je vous remercie d'avoir accepté cet entretien. Il n'est guère nécessaire de vous présenter, car vous êtes internationalement connu comme un des meilleurs spécialistes des systèmes fiscaux que les gouvernements de plusieurs pays consultent. Vous êtes l'auteur de nombreux ouvrages, dont le dernier, fort remarqué, traite du financement du budget de l'État en @. Vous traitez notamment d'un fait fort frappant dans ce pays, qui est l'absence d'impôt. Alors que le régime de @ est fort mal vu, comme réunissant un nombre impressionnant de très graves défauts, il y a un point qui fait pourtant rêver les gens, et c'est précisément l'idée que les habitants du pays ne paient pas d'impôts. Chez nous, nous sommes écrasés d'impôts, et on ne cesse d'en créer de nouveaux, en nous expliquant la nécessité de le faire et le bien que notre société en retirera, ou les maux qu'il s'agit d'éviter. Le moins qu'on puisse dire, c'est que le peuple n'est pas convaincu par tous les arguments qu'on lui donne, qu'il rechigne, et qu'il se révolte d'autant plus lorsqu'il apprend qu'il y a des pays, même aussi malfamés que @, qui ne lèvent aucun impôt sur leurs ressortissants. Les choses ne sont pas si simples, et il faut voir la contrepartie de cette politique fiscale, car il faut bien que l'État finance ses dépenses et qu'il reprenne autrement ce qu'il feint habilement de laisser aux habitants. Vous montrez dans votre livre qu'il serait illusoire de croire que l'État de @ ne coûte rien.

Pouvez-vous nous expliquer, professeur Duru, comment fonctionne ce système, pourquoi cet État a renoncé aux impôts, et comment il compense cette absence de ressources fiscales ?

Merci de votre invitation, Monsieur Mertens. C'est avec plaisir que je tenterai de répondre à votre question. Vous avez raison de remarquer que la situation est plus complexe que le profane ne se la représente d'habitude. Et d'abord, il faut immédiatement contester l'idée qu'il n'y ait pas d'impôts en @. Il y en a au contraire...

Oui, je me disais bien qu'il y avait quelque tromperie, de propagande, là.

Non, à vrai dire, ce n'est ni une tromperie, ni de la propagande, mais une fausse représentation qu'on se fait en généralisant à tort...

Et pourtant, c'est bien ce qu'on dit, que les @ ne paient pas d'impôt !

En un sens, c'est vrai, mais en un sens seulement.

Ah Ah ! Il y a bien là quelque chose de caché.

Laissez-moi expliquer. Comme je le disais, il est faux qu'il n'y ait pas d'impôts en @. Il y en a. Mais il n'y a pas d'impôts sur les personnes. C'est-à-dire que les revenus personnels ne sont pas taxés.

Voilà ce qu'on appelle une politique populiste ! Cela plaît aux gens, quand ils n'y réfléchissent pas davantage. Mais c'est en fait une injustice, parce qu'on ne fait pas payer comme il le faudrait les plus riches, les plus gros revenus.

C'est une façon de voir. Mais laissez-moi vous expliquer les raisons pour lesquelles on a renoncé à ces impôts personnels. Il est facile de connaître les arguments, parce que cette décision a fait l'objet de nombreux débats. L'impôt des personnes sur les revenus représente en théorie une bonne façon de répartir les impôts en fonction des revenus et de mettre davantage à contribution ceux qui gagnent le plus. Est-ce plus juste ? C'est un point sur lequel la discussion n'est de loin pas close, même chez nous, et l'on sait que certains rétorquent qu'il n'y a pas de raison de pénaliser ceux qui gagnent plus, et qui ou bien travaillent davantage, ou bien gèrent mieux leur travail, ou bien manifestent plus d'ingéniosité, etc. L'impôt sur les personnes est une manière de répartir un peu plus également la richesse, si tout va bien, et on peut dire que c'est plus juste si l'on considère que la justice consiste à s'approcher de l'égalité, notamment dans le domaine de la richesse. Je vous vois sur le point de me répliquer. Laissons cette question de côté, elle me paraît ouverte, et ce n'est pas le point qui m'intéresse, ni celui qui concerne les arguments décisifs des @ pour abandonner cet impôt personnel.

C'est connu, c'est une société inégalitaire, élitiste.

Encore une fois, ce n'est pas le point qui m'intéresse pour notre sujet. S'il y a une valeur qui est fondamentale en @, ce n'est pas l'égalité, mais la liberté.

Une sorte de capitalisme sauvage, quoi !

Certainement pas ! Pour revenir à notre sujet et comprendre la manière de raisonner des @, partons donc de l'idée qu'une société doit tenter de sauvegarder et de réaliser la plus grande liberté individuelle possible.

Oui, oui, l'individualisme pur !

Donc, pour que la liberté individuelle soit aussi grande que possible, il faut que l'État intervienne le moins possible dans la vie des gens pour les diriger et qu'il maintienne le niveau de contrôle des individus au strict minimum. Or la taxation du revenu implique le contrôle le plus exact possible des revenus, et par conséquent de toutes les activités qui peuvent rapporter un revenu, et de toutes les dépenses faites pour acquérir ces revenus. Bref, ce type d'impôt suppose une surveillance constante des individus, à peu près dans toutes leurs activités. Dans cette mesure, et c'est une mesure très importante, il est contraire à la liberté individuelle.

Il faut bien empêcher que les riches fraudent, cachent leurs revenus et fassent fuir leurs capitaux dans les paradis fiscaux !

Tout à fait juste si l'on veut imposer efficacement et équitablement l'impôt sur les revenus des particuliers. Vous voyez très bien comment cet impôt, pour être cohérent et juste, suppose la surveillance constante et assidue de chacun, afin d'empêcher qu'ils ne cherchent à frauder le fisc. Et remarquez que cette surveillance n'affecte pas que ceux qui sont malhonnêtes, mais tout le monde, puisqu'on ne sait pas à priori qui fraude ou serait disposé à le faire. Bref, il faut traiter tout individu comme suspect de fraude, et prendre des mesures comme s'il donnait des raisons de le soupçonner. L'homme honnête est donc considéré et traité dans ce système comme un probable escroc. On lui demande de se justifier sans cesse, comme s'il était sous le coup d'une accusation perpétuelle. Et la restriction de sa liberté est déjà comme une sorte de punition préventive qu'on lui inflige. Selon une image qu'on trouve chez les @, cette manière de faire transforme la société en une gigantesque prison dans laquelle tous sont prisonniers, sous l'œil inquisiteur des gardiens que sont les fonctionnaires du fisc. L'image est un peu forte, mais elle exprime bien le sentiment général des citoyens de ce pays.

J'ai un peu de peine à vous suivre. L'homme honnête n'a rien à cacher et ne risque rien.

Autrement dit, l'homme honnête se voit obligé de se rendre transparent pour son gouvernement, et il doit ainsi montrer sans cesse patte blanche. Mais la liberté, si je suis la conception qu'en ont les @, comporte non seulement la liberté d'agir selon sa volonté, mais aussi celle de juger selon sa propre conception des choses. Au contraire la surveillance place celui qu'on surveille non seulement sous l'œil du surveillant, mais aussi sous son jugement perpétuel, et sous le poids de l'autorité de ce jugement, et cela pour tous les actes qui tombent sous son regard, qu'ils concernent ou non l'objet précis de la surveillance. Voilà la raison principale pour laquelle ils ont refusé l'impôt sur le revenu ou la richesse des individus.

C'est un maigre argument. Un prétexte transparent pour favoriser les plus riches.

Disons les choses ainsi, pour reprendre l'une de leurs formules : il ne faut pas que les individus soient transparents pour un gouvernement opaque, mais que le gouvernement soit transparent pour des citoyens libres, et libres aussi de garder leurs secrets. Vous savez comment on nomme d'habitude le régime politique dans lequel un gouvernement prétend s'ingérer dans toute la vie de ceux qui dépendent de lui, tout voir et tout juger, bref, tout diriger ? C'est le totalitarisme.

Allons donc ! Vous n'allez pas prétendre que, parce que nous avons l'impôt individuel, nous sommes dans un régime totalitaire !

Qu'importe ce que j'en pense. Je vous parle de @, et ils le prétendent en effet, pour cela et pour d'autres raisons encore.

En tout cas, moi et la plupart de mes connaissances, nous nous sentons libres.

Tant mieux. Mais concernant notre question, il me faut bien remarquer au contraire que les @ ne se sentent pas libres, eux, dans un tel système, et qu'ils préfèrent renoncer à l'impôt individuel. D'ailleurs, ils ont d'autres arguments, quoique plus secondaires dans leur esprit. Par exemple, ils remarquent que la surveillance impliquée par cette forme d'impôt, ainsi que la complication administrative pour le percevoir impliquent un grand corps de fonctionnaires, qui à lui seul mange déjà une partie des revenus obtenus, si bien que cet impôt reste également loin d'être optimal économiquement, surtout si l'on compte en plus tout le travail demandé aux individus pour le déclarer, travail qu'ils ne consacrent pas à produire quelque chose de plus utile.

Et alors, où trouvent-ils l'argent nécessaire aux dépenses de l'État ? Par quels impôts remplacent-ils l'impôt sur le revenu ?

D'abord, leur principal effort est de se passer de l'impôt autant que possible...

Mais ce n'est pas possible !

Pour y parvenir, il faut que l'État dispose d'autres revenus, de revenus propres. Et c'est ce dont on s'est soucié. D'abord, il faut se souvenir du fait que dans ce pays, le terrain, dans sa totalité, reste entièrement la propriété de l'État. Personne ne peut le posséder, et pour en disposer, pour exploiter ses ressources, il faut le louer à l'État, ce qui lui rapporte des sommes considérables.

C'est ce qu'on appelle tomber de Charybde en Scylla. Pour sauver soi-disant leur liberté, les @ refusent l'impôt et acceptent d'être privés de la propriété de toute terre, bref de dépendre de l'État pour leur habitation, de n'être jamais vraiment chez eux. Comment peuvent-ils être libres s'ils ne peuvent pas même posséder un coin de terre et une maison à eux, où ils peuvent faire ce qu'ils veulent ?

C'est une objection qui vient immédiatement à l'esprit en effet, et qu'on leur oppose souvent. Vous disiez que vous vous sentiez libre malgré le contrôle de l'État, et ils se sentent également libres malgré le fait qu'ils ne sont que locataires. Ils ajoutent que dans les autres pays la propriété n'est assurée que par les lois, et donc par l'État, si bien qu'elle n'est pas absolue. Cela se voit notamment par le fait que les lois valent pour tous, même quand ils se tiennent chez eux, sur leur propriété, et aussi par le fait que partout l'expropriation existe dans diverses circonstances. Ils ne voient donc pas en quoi ils ne sont pas aussi à l'aise chez eux dans une maison et sur un terrain loués à l'État que dans une propriété qui ne leur est de toute manière garantie aussi que par l'État. D'ailleurs, ils peuvent louer à long terme s'ils le désirent et se sentir aussi bien établis et en sûreté chez eux que n'importe quel propriétaire. Ils ajoutent que, n'ayant pas de famille, la perspective de laisser un héritage à leurs enfants ne les préoccupe pas comme les parents chez nous, ce qui, il faut bien l'avouer, compte beaucoup dans notre désir de propriété.

Et cela suffit au budget de l'État ? La location du terrain doit revenir horriblement cher. D'autant qu'ils sont très généreux avec leur revenu universel, une autre chose très propre à séduire aussi dans une propagande populiste.

Le revenu universel vient d'une autre source. Je vous ai dit qu'il n'y avait pas d'impôt sur les revenus individuels, mais non pas qu'il n'y avait pas d'impôts du tout. Il y a notamment une taxe sur le travail des machines et des robots qui finance justement ce revenu universel. On considère que les résultats de l'ingéniosité des hommes, toute la technique, ne doivent pas profiter d'abord à ceux qui s'approprient les machines, mais à tout le monde. C'est pourquoi le travail des engins techniques est taxé et réparti entre les ressortissants du pays sous la forme de ce revenu universel.

C'est du communisme !

Si vous voulez. Mais cela n'interdit pas l'exploitation privée des produits de la technique, ou des outils de production, si vous préférez. Et cela vous paraîtra du capitalisme. De toute façon, le profit de cette exploitation reviendra pour la plus grande part à tous les ressortissants du pays. Il y a une certaine analogie entre le profit que l'État retire de la terre, qu'il loue, et celui qu'il retire du travail des machines et des robots en y participant par une taxe. En quelque sorte, les machines ne sont pas les propriétés entières de ceux qui les possèdent, puisqu'ils doivent partager les profits de leur utilisation avec l'État.

Et cela ne demande-t-il pas aussi un contrôle ? Les @ ne devraient-ils pas s'y opposer pour garder intacte leur liberté ?

Très bonne question en effet. Et vous imaginez bien que les @ en ont beaucoup discuté, justement parce qu'il est évident que cette taxe implique le contrôle du travail des machines et des robots, et que tout contrôle suppose une certaine limitation de la liberté, comme vous l'avez judicieusement remarqué. De plus, ce contrôle a un coût, et il faut donc déduire ce coût de ce que rapporte la taxe. On pourrait croire qu'il ait dû se former un parti opposé à cette taxe, à cause de ces inconvénients, qu'on a jugés si graves dans le cas de l'impôt sur le revenu individuel. Cette opposition existe en effet, mais elle est très minoritaire. En réalité, presque personne n'a contesté cette taxe. Le débat a plutôt porté sur les façons de limiter le contrôle le plus possible et de rendre le moins onéreuse possible la perception de cette taxe. On peut repérer trois positions principales sur le sujet, qui ont d'ailleurs évolué dans leur détail au cours de l'histoire récente. Selon les partisans de la position aujourd'hui la moins représentée, il fallait...

Veuillez m'excuser professeur. Je vous vois entreprendre un développement qui risque d'être un peu trop technique pour nos auditeurs, plus curieux de connaître les grands principes que le détail des débats. Et de toute façon, cette taxe est affectée à un seul rôle particulier, et elle n'explique donc pas comment le budget général de l'État peut être suffisant en renonçant à l'impôt sur les revenus individuels. N'y a-t-il pas d'autres ressources pour compenser ?

Il y a d'un côté les ressources qui doivent être suffisantes, en effet, mais de l'autre les dépenses peuvent aussi être réduites par rapport à celles de nos propres États.

Ah voilà, l'austérité ! Ils n'y échappent pas non plus, et elle doit être particulièrement douloureuse avec des ressources limitées.

On peut à la rigueur parler d'austérité, dans un sens large, quoique les @ préfèrent parler d'économie. Et il y a lieu de distinguer, si l'on compare leur situation à la nôtre. L'austérité chez nous est fortement liée à la dette et à son remboursement, et surtout au service des intérêts. Il n'y a rien de tel chez eux, où il est interdit à l'État d'emprunter, et où il n'existe donc ni dette ni intérêts de la dette.

Pas de dette ? Voilà une société bien extraordinaire !

Oui, vous le dites. Mais remarquez que si un budget équilibré est aujourd'hui une rareté, et dans bien des pays quelque chose de jugé à peu près impossible, cela n'a pas toujours été le cas, et est loin d'être impossible, même en dehors de @. On entend sans cesse parler chez nous du gaspillage du gouvernement, de sa corruption, et l'on sait bien que si l'on pouvait y remédier, les dépenses pourraient être passablement diminuées. Seulement, on n'y parvient pas, et l'on désespère le plus souvent d'y réussir, comme si cela faisait partie des défauts inévitables de toute société. Au contraire, en @, la lutte contre ce gaspillage et contre la corruption est constante, et on a organisé le système politique et toute la société, y compris l'éducation, de manière à pouvoir rendre cette lutte efficace. Par exemple...

C'est très intéressant, mais cela nous entraînerait dans un autre sujet. Permettez-moi de revenir plutôt à la question des impôts. N'y a-t-il vraiment pas d'autres impôts que cette taxe sur les machines, à moins qu'on ne considère aussi la location du terrain comme une sorte d'impôt déguisé ?

Non, je ne considérerais pas pour ma part la location du terrain par l'État comme un impôt. Le rapport reste le même que dans le cas où on louerait ce même terrain à un propriétaire privé, et l'on ne parlerait pas d'impôt dans ce cas.

Sauf que dans le cas d'un propriétaire privé, la location dépend du marché et n'est pas imposée à un prix décidé par le seul propriétaire.

Vous avez raison concernant l'intervention du marché. Et précisément, les @ ont inventé un mécanisme par lequel, malgré le fait que l'État est le seul propriétaire de tout le territoire du pays, et se trouve en situation de monopole, si l'on veut, le marché joue son rôle. Vous imaginez bien en effet que tout terrain n'est pas loué au même prix, par exemple s'il est bâti ou non, s'il est situé en ville ou à la campagne, au centre ville ou en périphérie, dans un paysage agréable ou non, etc. Chaque location fait l'objet d'une mise aux enchères qui en fixe le prix en fonction de la concurrence qui s'exprime, et par conséquent en fonction de l'intensité des désirs des locataires possibles. Vous voyez que c'est bien le principe de la concurrence sur le marché qui joue ici, malgré le fait que l'État est le seul à représenter le côté de l'offre.

Bon, alors si ce n'est pas un impôt, je reviens à ma question : y a-t-il d'autres impôts que la taxe sur les machines, qui ne paie que le revenu universel ?

Oui. L'un des impôts importants est celui qui touche les entreprises. Mais pour comprendre comment il fonctionne, il faut savoir que la structure des entreprises en @ est généralement très différente de celle de nos entreprises. En effet, même s'il y a dans ce pays des entreprises du style des nôtres, qui font travailler des salariés, souvent en assez grand nombre, elles restent atypiques et assez peu nombreuses, souvent d'ailleurs mixtes, avec une partie seulement du travail étant effectuée par les salariés. En effet, il est interdit aux citoyens de @ de travailler pour un salaire.

J'ai déjà entendu cela, sans bien comprendre. Doivent-ils travailler gratuitement ?

Non, ils peuvent se faire payer, mais non pas recevoir un salaire.

Voilà ce que je ne comprends pas. Cela me paraît contradictoire, comme si vous disiez qu'ils reçoivent un salaire sans en recevoir.

Pour comprendre la vie économique en @, il faut bien faire la distinction. Je prends un exemple. Quand vous faites venir le plombier, il travaille pour vous pour faire l'installation ou la réparation que vous lui demandez, et vous le payez. Mais vous ne lui donnez pas de salaire.

Évidemment. Je ne suis pas son patron. Mais nous parlons d'entreprises.

Eh bien, justement, les citoyens ne peuvent pas travailler pour un salaire dans les entreprises qui emploient en payant sous cette forme. Et c'est précisément parce que les @ jugent incompatible d'être au service de quelqu'un, comme l'est un salarié face à son patron, et d'être libre ou responsable politiquement.

Et pourquoi ? Je reçois un salaire et je suis citoyen. Je n'y vois aucun inconvénient, et moins encore une incompatibilité.

C'est tout un sujet. Les @ jugent qu'un citoyen doit être suffisamment autonome, y compris économiquement, pour pouvoir prendre des décisions libres et participer activement à la vie d'une démocratie.

Vous avez raison, c'est encore un sujet différent du nôtre. Revenons donc à l'impôt sur les entreprises qui n'embauchent pas de salariés.

Je vous expliquais donc que la plupart des entreprises ne faisant pas travailler des salariés, elles ont une structure très différente des nôtres. Il faut en effet traiter avec chacun des responsables d'un travail comme vous le faites avec votre plombier, qui n'est pas votre salarié, et n'a donc pas à vous obéir comme si vous étiez son patron. Bien que vous ne soyez pas son patron, et que vous ne puissiez pas lui donner des ordres, vous lui dites cependant ce que vous voulez qu'il fasse pour vous, et si vous avez plusieurs travailleurs indépendants qui travaillent pour vous, vous organisez leurs activités et les coordonnez en accord avec eux. Dans ce sens, vous êtes bien un entrepreneur.

Oui, je vois ce qui peut se passer si je veux par exemple rénover ma maison, et qu'il me faut tenter de coordonner le travail du plombier, du plâtrier, de l'électricien, etc. A vrai dire je préfère laisser ce travail à l'architecte ou à un entrepreneur. C'est un casse-tête, et il est horriblement compliqué d'organiser le travail de cette façon. A vous dire franchement, je ne crois pas que ce soit possible dans une véritable entreprise, d'une certaine ampleur. Alors, s'il faut comprendre tout cela pour saisir cet impôt, je crois que nous n'aurons malheureusement plus le temps pour cette explication. Pouvons-nous retenir simplement qu'il y a bien un impôt sur les entreprises, et que l'État perçoit ainsi de quoi financer une partie substantielle de son budget ?

Oui, puisque nous sommes limités par le temps, nous pouvons résumer provisoirement la chose ainsi. Mais c'est naturellement bien plus compliqué.

Hélas ! Le temps passe trop vite et nous sommes malheureusement déjà parvenus à la fin de notre entrevue, fort intéressante, avec l'espoir de pouvoir une autre fois aborder d'autres aspects du sujet, dont vous nous avez laissé entrevoir à quel point il est complexe, les @ ne faisant presque rien comme le reste du monde.

Merci de l'invitation. C'est avec plaisir que je reviendrai vous parler de ce sujet très important pour comprendre la vie économique de @.

Merci professeur.



Entretien réalisé par André Mertens, chef de la rubrique politique étrangère à l'Examinateur



Il est possible de voir la vidéo de cet entretien à l'adresse suivante :

politique_et.examinateur.com/entretiens/mertens/3020615/vd