Rapport secret de la CIA no Xm@524%e&
Résumé à l'intention du président
Le gouvernement de @, ce pays non conforme déjà placé depuis longtemps par les États-Unis sur la liste des États voyous, a été suspecté de mener une guerre indigne contre l'ensemble des nations les plus puissantes de la planète en s'attaquant à un nombre important de responsables dans les mondes de la politique, des affaires et de la spéculation. Ces personnes auraient été infectées par un virus artificiel qui permettrait au gouvernement de @ de les tuer à volonté à tout moment. Pour éclairer cette affaire, nous avons été chargés de la mission Ours Fâché, dont nous livrons ici le résumé des résultats provisoires. Il faut commencer par rappeler les conditions très difficiles de cette mission, comme de toutes celles qui concernent le pays ennemi @. En effet, contrairement à ce qui se passe dans tous les autres pays du monde, ni la CIA ni les autres agences de renseignement des pays alliés n'y ont de réseau efficace. Cette situation déplorable n'est pas due au manque d'efforts, mais bien à la nature très particulière de ce pays qui s'est placé hors de tout ordre commun. Il ne nous est plus possible de différer l'aveu de notre échec, et il nous faut maintenant tenter d'en expliquer les raisons, car nous en sommes réduits à reprendre son analyse et à repartir presque de rien. C'est pourquoi ce rapport concernera davantage ce problème que celui qui faisait l'objet direct de la mission Ours Fâché. Néanmoins, nous commencerons par indiquer les résultats obtenus, avant de revenir à l'analyse des raisons de leur insignifiance. En deux mots, nos efforts pour entrer dans les secrets du gouvernement de @ à partir des sources internes au pays sont restés totalement vains. Nous n'avons pas réussi à savoir quels pouvaient être ces virus artificiels, d'où ils pourraient provenir, ni même s'il existe en @ une véritable recherche scientifique à leur sujet et à quel état elle se trouve. Les soupçons que nous avions à vérifier n'ont donc pas pu l'être de cette manière. Nous avons tenté une autre voie, externe. Il s'agissait de chercher si les personnes suspectes d'être infectées par ce virus l'étaient réellement. Mais la tâche était très délicate puisqu'il fallait soumettre à des examens et à diverses épreuves les sujets concernés, et qu'il s'agissait, cette fois-ci, de personnes des classes les plus riches et les plus influentes, c'est-à-dire, en réalité, de nos propres patrons. Nous avons fini par découvrir un milliardaire italien d'assez mauvaise réputation, M. S., que, en désespoir de cause, nous avons utilisé comme cobaye, avec l'autorisation des plus hautes autorités de notre pays. Nous lui avons nous-mêmes fait ingérer un dessert contaminé par d'autres virus de notre propre fabrication lors d'un banquet d'hommes d'affaires et de politiciens en Italie, sans bien sûr que personne dans ce pays n'ait été mis au courant. Ce virus a fait son effet, et M. S. est tombé gravement malade. Sa maladie étant inconnue de la médecine italienne, notre cobaye a dû se faire hospitaliser dans un hôpital militaire américain en Italie, où nous avions quelques médecins-chercheurs de pointe. Leur rapport, annexé à notre rapport complet, montre qu'ils n'ont rien pu trouver, après un examen pourtant très exhaustif tant sur le patient vivant que sur son cadavre, après que notre traitement eut entraîné son décès (naturellement expliqué officiellement par le fait qu'il était atteint d'une maladie inconnue de nos médecins comme des médecins italiens). Le problème subsiste entier pour plusieurs raisons. Premièrement, nos chercheurs ne sont pas sûrs que le virus cherché n'ait pas été présent dans le corps sous une forme qui leur aurait échappé. Deuxièmement, nos services de renseignements ont entre-temps trouvé des indices d'une éventuelle sympathie de M. S. pour @, ce qui rendrait plausible le fait qu'il n'ait pas été infecté. Comme nous n'avons pas obtenu pour l'instant l'autorisation de tenter à nouveau l'expérience sur des personnes de premier rang dont il soit certain qu'elles n'ont aucun lien de sympathie avec @, l'enquête a dû s'arrêter là. Nos tentatives de remonter à la source de l'information, ou de la rumeur, selon laquelle le gouvernement de @ aurait utilisé ce moyen de l'attaque virale des personnes les plus puissantes et les plus riches du monde pour interdire toute agression de son pays, sont restées également vaines. Et nous ne savons donc pas si ces attaques viennent ou non de @. La raison principale de cette absence de résultats de notre mission Ours Fâché, vient comme nous l'annoncions de l'impossibilité de créer de véritables réseaux de renseignement opérationnels en @. Voici maintenant l'analyse que nous pouvons faire pour l'instant de cette situation. L'obstacle principal se trouve dans l'ordre aberrant de ce pays et dans le caractère tout à fait anormal de sa population. Nous savons que les frontières de @ ne sont pas ouvertes, et que les gens aussi bien que les marchandises n'y passent que sous un contrôle pointilleux. Elles ne sont pourtant pas fermées non plus, et l'ouverture est suffisante pour nous y infiltrer. Selon leur politique, c'est l'autonomie du pays plutôt que son isolement qui est recherchée. On sait qu'ils produisent leur alimentation et tous les produits nécessaires à la vie à l'intérieur de leurs frontières, refusant le commerce dans ces domaines. C'est pourquoi la voie habituelle de créer des famines et d'empoisonner la population à travers le commerce agro-alimentaire notamment, nous a toujours été impossible en @. Par contre les idées circulent et entrent librement chez eux. Et nous avons déjà maintes fois tenté d'agir par la propagande, sans succès non plus, sans que nous sachions encore tout à fait pourquoi. Bref, le problème n'est pas en soi de faire pénétrer des agents dans le pays, même si c'est plus difficile que dans les pays plus ouverts, ni d'y faire de la propagande. D'ailleurs, nous avons connu, avec les pays communistes, des situations plus difficiles encore à cet égard, et cela ne nous a pas empêchés de constituer des réseaux d'information dans les pays les plus fermés, surtout parce qu'il est toujours possible d'acheter de diverses manières les ressortissants de ces pays. Et c'est ce qu'il nous est impossible de faire avec les citoyens de @, bien que nous l'ayons tenté de nombreuses façons, qui sont décrites en détail dans le rapport complet. Il faut remarquer que la relative ouverture du pays aux étrangers ne vaut en réalité que d'une manière générale. Il existe certaines provinces de @, qu'ils nomment les provinces éducatives, qui sont totalement interdites à toute autre personne que les citoyens du pays, et comme vous le savez, la peine de mort existe pour ceux qui transgressent ces interdictions, tant ils les prennent au sérieux. Aucun étranger ne sait donc exactement, ou n'a vu lui-même, ce qui se passe là, bien que nous soyons renseignés en général. Et c'est dans ces provinces que se situe le vrai cœur de @, que nous ne pouvons pas atteindre. C'est là qu'ils y élèvent leurs enfants, en commun, puisqu'il est bien connu que ces sauvages d'un nouveau genre ont aboli la seule structure vraiment humaine à la base des sociétés, celle de la famille. Nos spécialistes de la psychologie individuelle et sociale pensent que la vraie raison de nos problèmes se trouve là, d'une part dans l'absence des familles, et de l'autre dans la forme particulière de l'éducation donnée à l'ensemble de leur peuple, et d'abord aux enfants dans les provinces éducatives. Nous savons que là, les enfants n'ont aucun contact avec la vie extérieure à celle de leur province, qui est entièrement artificielle, adaptée à leur éducation. Nous n'avons aucun moyen de les atteindre, ni par des rencontres physiques, ni par la télévision ou internet, qui sont entièrement contrôlés dans ces provinces par les éducateurs, ni même par les écrits, qui sont également tous sous leur contrôle strict. Même les stages plutôt courts que ces enfants font hors des provinces éducatives ne permettent pas de les aborder suffisamment pour avoir sur eux une influence utile. Nos pays libres ont dénoncé mille fois ce totalitarisme insoutenable, et ont fait toutes les pressions que l'on sait pour le faire cesser, envisageant même l'intervention armée, et pourtant on n'imagine pas à quel point il est véritablement total, sans faille. Le plus étrange est que ce totalitarisme dans l'éducation parvient si bien à déjouer nos tentatives de le comprendre que nous n'avons jamais réussi à définir la doctrine qui est inculquée à leurs enfants. En apparence, ils n'y en a aucune, ils connaissent même toutes les opinions et théories qu'on peut trouver partout dans le monde présent et dans l'histoire, et néanmoins, chacun sent bien en discutant avec les @ qu'il y a quelque chose d'indéfinissable, mais de très puissant, qui leur a été inculqué et qui semble les rendre insensibles à toutes nos tentatives de propagande. Il serait très important pour nous de savoir en quoi cette éducation consiste plus exactement afin de chercher comment la déconstruire pour avoir une prise sur ces êtres rendus anormaux et inaccessibles à toute influence humaine normale. Ils ne se laissent pas acheter, mais rient au nez de ceux qui le tentent ou les dénoncent. Ils ont été si fortement endoctrinés qu'ils préfèrent vivre à leur manière que de jouir des plus grandes fortunes chez nous, et qu'ils vont jusqu'à mépriser entièrement la perspective de tout ce qu'un homme normal recherche. Il semble que, n'ayant pas de famille, ils s'attachent d'autant plus à leur pays. Mais ce n'est pas entièrement vrai non plus, parce qu'ils voyagent assez librement et se montrent curieux de toutes les mœurs qu'ils peuvent découvrir. Mais ils sont aussi tellement critiques face à la vie des autres peuples qu'ils visitent, contestant parfois les plus hautes valeurs pourtant, qu'aucun pays ne leur paraît comparable au leur. Ils sont si profondément dérangés et éloignés de toute humanité normale que, comme de nombreux observateurs l'ont expérimenté à maintes reprises, ils critiquent même volontiers leur pays, avançant des arguments contre certaines de leurs institutions auxquelles nous n'aurions pas même pensé, nous qui en sommes les ennemis, voyant des défauts parfaitement imaginaires parfois, là où nous verrions au contraire, s'il se peut dans un tel pays, quelque reste d'ordre normal. Et cela ne les empêche pas de préférer infiniment leur pays à tout autre, et de tenter sans cesse de pousser à des réformes les peuples qu'ils visitent ou chez lesquels ils s'installent. Mais ceci est bien connu, et cette espèce de guerre de propagande qu'ils font à travers la planète est justement l'une des raisons pour lesquelles nous ne pouvons nous contenter de les laisser vivre chez eux, ce qui serait déjà trop grave en soi. Jusqu'à présent, malgré toutes nos tentatives, ni chez eux ni à l'étranger nous ne parvenons à comprendre les êtres monstrueux qui sortent des provinces éducatives de @. Quand ils se présentent sous leur forme spontanée, ils sont si bizarres que sur toute la terre on les reconnaît immédiatement. Ils sont toutefois assez habiles pour se confondre avec la population locale lorsqu'ils le cherchent, quoiqu'ils ne le fassent que rarement pour des temps très longs. Or le phénomène inverse a lieu également, quoique, malheureusement, de manière partielle seulement. Eux aussi nous reconnaissent au premier coup d'œil. Mais, contrairement à eux, nous n'avons jamais réussi à imiter suffisamment bien leurs attitudes pour ne pas nous faire repérer. Avant que nous ayons dit un mot, ils nous ont déjà reconnus comme étrangers, et au plus tard, dès que nous disons la moindre chose, nous sommes repérés. De plus, non seulement ils voient que nous sommes étrangers, mais ils devinent très rapidement que nous sommes des espions, comme ils disent. Nous n'avons encore jamais trouvé comment ils y parviennent ni par conséquent comment les déjouer. Nous avons pourtant infiltré des agents durant des années en @ pour qu'ils en apprennent les mœurs en détail, et le résultat a été ou bien qu'ils n'ont pas réussi à s'assimiler suffisamment, ou bien qu'ils nous ont abandonnés et qu'ils ont entièrement changé de camp, sans même pour autant parvenir à s'assimiler tout à fait. Il y a pire. Un certain nombre de nos agents, après leur mission dans leur pays, passent secrètement à leur service, et nous avons déjà dû nous défaire de plusieurs agents doubles. Par cette infiltration de nos propres services, ils sont au courant de ce que nous voulons entreprendre contre eux et nous rendent la tâche encore plus impossible qu'elle ne l'est déjà. Dans notre agence, il est devenu clair que nous ne parviendrons à rien tant que nous ne comprendrons pas de quelle manière ces gens sont formés. Il nous faut percer le mystère de leurs provinces pédagogiques pour pouvoir agir sur eux, et pour l'instant, il nous est entièrement opaque. C'est pourquoi nous avons besoin de groupes de recherche en psychologie plutôt que d'agents de terrain, jusqu'à ce que nous en sachions assez pour former spécialement des agents capables de s'infiltrer efficacement chez eux. Nous regrettons amèrement de devoir avouer ainsi notre échec et de nous trouver dans l'obligation de proposer de nous en remettre à un corps d'experts que nous n'avons pas pu trouver dans nos rangs. Mais c'est la seule perspective de solution que nous puissions voir, après avoir tenté bien d'autres voies, qui sont décrites et évaluées dans notre rapport complet.
Note ultra-secrète de l'agent CX112, chargé de remettre au président ce rapport en main propre C'est avec la plus grande crainte et en tremblant que j'ajoute ces lignes à ce rapport. Mais mon patriotisme m'y engage, car les remarques que je tiens à faire sont de la plus haute importance pour la sécurité de mon pays. Il a été remarqué dans le rapport et le résumé que plusieurs de nos agents que nous avions envoyés en mission en @ sont revenus dans notre agence comme agents doubles au service de @. J'ai de fortes raisons de croire que ce phénomène est beaucoup plus répandu qu'on ne le sait ou ne veut le savoir, et que beaucoup de nos agents, même de ceux qui n'ont jamais été en @, mais qui ont eu contact avec des citoyens de ce pays diabolique, sont également des agents doubles. Et c'est une raison déterminante pour laquelle tous nos efforts pour agir sur ce pays échouent, étant connus longtemps avant du gouvernement de @. Enfin, même la proposition apparemment raisonnable sur laquelle conclut ce rapport, d'étudier à fond le système d'éducation des @, me laisse craindre qu'il ne s'agisse d'un moyen de faire pénétrer davantage leur propagande dans nos services secrets. Il fallait que je le dise, dans le plus grand secret, car je ne me fie plus à personne. |